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En photo Publié le 22 juillet 2015

Gueule d’Ange – Numéro 22 – Arts Factory

Rencontrer Effi Mild et Laurent Zorzin, les fondateurs de la galerie nomade Arts Factory, dans leur bureau à Montreuil, c’est à coup sûr risquer la surdose d’émerveillement.

Mais comment ont-ils fait, après 15 années passées au coeur de la création graphique, pour éviter les rides et stigmates de la suffisance et garder une telle fraicheur d’expression ? Les galeristes, proches de Daniel Johnston, Willem ou Pierre la Police vous accueillent dans une pièce dont les murs sont couverts, du sol au plafond, de dessins issus de la scène underground française, qu’ils représentent et défendent depuis 15 ans. Livres, cartes postales, digigraphies, affiches et oeuvres originales se serrent et se pressent autour des deux bureaux face à face. La quarantaine tout juste, humbles et souriants, Effi et Laurent semblent, dès les premiers regards échangés, prêts au partage, la confidence et l’écoute, au-delà des tensions, dans une humanité simple. Tout est réuni pour un bon moment d’interview. 

 

Arts Factory : une galerie nomade au carrefour de l’art contemporain, de l’illustration et de la bande dessinée



Au départ,  Art Factory est un espace d’exposition à mi-chemin entre la boutique et la galerie. Le but est d’offrir aux artistes un lieu d’exposition convivial, de montrer leurs œuvres sans qu’ils aient forcément à franchir les étapes de la reconnaissance qu’imposent les galeries traditionnelles. Un lieu qui soit le plus ouvert possible sur la rue, que le visiteur, curieux ou collectionneur averti, en franchisse la porte sans appréhension. A cette époque, en 1996, peu importe le support et le mode d’expression. Peinture, photo, dessin, sculpture, tous les genres sont accueillis. 

« Puis, de jeunes éditeurs passionnés nous ont rapidement proposé de présenter des livres au tirage très limité, souvent imprimés en sérigraphie par les artistes ou des collectifs comme Les 4 Mers, CBO, Le Dernier Cri … et là, l’univers du dessin a vraiment pris le pas sur les autres disciplines. Nous avons exposé des artistes de notre génération qui, pour certains d’entre eux, sont largement reconnus aujourd’hui : Killoffer, Jochen Gerner, Sophie Dutertre, Thierry Guitard, Pierre La Police, Tom de Pékin, Jean Lecointre, Guillaume Dégé, Blanquet … Ils nous ont amené à rencontrer Willem, le dessinateur et chroniqueur de Libé. D’abord venu en voisin, ce véritable parrain de la scène graphique a finit lui aussi par être régulièrement accroché sur nos murs tout comme Kiki et Loulou Picasso – fondateurs du collectif Bazooka ou Placid et Muzo,  autres figures tutélaires de l’underground français ! »


Des relations fortes sont ainsi nées entre artistes et galeristes et dès la fin des années 90, Arts Factory devient un lieu de diffusion de référence pour les dessinateurs et les créateurs de graphzines qui apprécient l’énergie très Do It Yourself de ce duo. La cohérence dans la programmation de l’Arts Factory tient d’ailleurs plus dans cette aventure humaine qui préside chaque exposition ou projet d’édition, que dans une réelle volonté d’exhaustivité dans la représentation de la scène artistique alternative. 


 

Éditeur "dans la marge" et galeristes nomades



La réussite a vite dépassé les espérances et après plus de 150 expositions programmées, ces deux électrons libres, passionnés de livres et de beaux papiers, ont pu commencer à développer une activité éditoriale tentaculaire. Affiches, cartes postales, sérigraphies, digigraphies … tout les supports sont bons pour faire partager au plus grand nombre leurs coups de cœur, avec en tête de pont un concept particulièrement original : la collection Dans la Marge.  Pour ce projet, Effi et Laurent confient à leurs artistes de prédilection, un cahier de 32 pages – celui avec lignes et marges que nous avons tous eu en main à l’école primaire – avec pour unique mission de le couvrir de dessins, croquis et empreintes multiples, sans aucune contrainte de temps, de  thème ou de technique.

« Fin 2006 le premier cahier est revenu du fin fond du Texas, envoyé par Daniel Johnston qui avait trouvé là le moyen idéal pour exorciser de vieux démons, puis Isabelle Boinot – entre deux expositions avec le collectif Frédéric Magazine – nous annonce qu'elle "Montre Tout" dans le sien ! Dans la foulée Julien Langendorff nous fait parvenir ses dessins littéralement grattés au stylo bille pendant un séjour à Berlin … Très vite, la décision est prise de publier cette curieuse correspondance graphique sous la forme de fac-similés et Daniel Johnston inaugure la collection Dans la marge / cahiers de dessins contemporains en juin 2007. Elle compte à ce jour 13 titres, diffusés dans une centaine de points de vent en France et à l’international.»

Leur investissement dans l’édition n’a pas remis en cause les expositions, bien au contraire !  En avril 2006,  Effi et Laurent – qui ont entre temps lancé l'agence d'illustrateurs La Superette – se sentent à l'étroit dans leurs locaux et font évoluer l'Arts Factory en galerie d'art nomade, cherchant désormais à multiplier les points de visibilité pour leurs artistes. Deux adresses parisiennes sont privilégiées pour cette nouvelle programmation : l’espace EOF et l’espace Beaurepaire à deux pas de la Place de la République, mais aussi des lieux plus intimistes comme Le Monte en L’air,  l’Imagigraphe ou la Place Forte. Autre spécificité, les expositions voyagent désormais en région en s’associant à des événements tels que les  «Rencontres du 9ème art » d’Aix-en-Provence, « Qualité Féroce » à Troyes, « Les Itinéraires Graphiques » de Lorient .  Le Lieu Unique – prestigieuse scène nationale nantaise – est également un point de chute régulier.

En septembre 2011, Arts Factory fête à Paris son quinzième anniversaire avec l’exposition « Teen Spirit », ou l’adolescence dessinée par le meilleur de la scène graphique contemporaine.  Un rendez-vous immanquable pour les aficionados, et l’occasion pour les néophytes de s’immerger dans une foisonnante nébuleuse artistique défendue avec passion.


 

La scène graphique numérique




Au-delà de l’illustration et du dessin traditionnel, Arts Factory s’intéresse également aux artistes qui développent leurs univers à partir des outils infographiques.  L’évolution qualitative des procédés d’impression permet désormais de présenter leurs oeuvres sur un support noble, qui respecte le rendu obtenu à l’écran et en garantit la pérennité sur plusieurs décennies. 

« Depuis 2005, les digigraphies que nous exposons sont exclusivement réalisées par Négatif Plus. Nous avons finalement  opté pour le papier Hahnemuhle Rag 308 grammes qui permet d’obtenir des noirs profonds et des couleurs saturées proches de la sérigraphie, tout en privilégiant l’aspect mat et naturel d’un papier traditionnel.  Les  tirages que nous proposons vont du 30 x 40 cm au 100 x 70 cm, avec une gamme de prix comprise entre 100 et 650 € quels que soient les artistes édités.»


Pour ce numéro de Gueule d’Ange qui leur est entièrement dédié, Effi et laurent ont choisi de présenter le travail de quatre artistes explorant chacun avec leur sensibilité et leur imaginaires – souvent débridé – les possibilités offertes par la création numérique : Jean Lecointre, Rocco, Michel Pirus et Blex Bolex.

Nils Sidsel


pour en savoir plus :
http://www.artsfactory.net 
http://www.lasuperette.com
http://www.danslamarge.net







 
 
Numéro : 22 Spécial Arts factory
Juillet – Aout – Septembre 2011


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