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En photo Publié le 1 août 2015

Gueule d’Ange – Numéro 31 – Manuel Lagos Cid

Manuel Lagos Cid est connu pour ses portraits de célébrités. Régulièrement, stars internationales et figures éphémères de l'actualité médiatique, croisent ses lumières et se prêtent au jeu de ses mises en scènes. David Lynch, Woody Allen, Almodovar, Charlotte Rampling, Sofia Coppola, …



Eva Mendes, Amélie Nothomb ou Alain Souchon, sont au nombre des curiosités "people" qui jalonnent son travail. Chaque séance de prise de vue, qu'elle soit organisée dans l'urgence, à la suite de l'interview, ou préparée en studio, est une rencontre particulière. Sans effets systématiques, sans technique prédéfinie à appliquer de manière sécurisante, Manuel Lagos Cid met en scène et construit la lumière qui convient. Point de vue légèrement en contre-plongée, souvent de face, lumière dirigée, aux ombres découpées, c'est en général l'idée qui s'impose, avec un jeu graphique à chaque fois renouvelé.

Manuel Lagos Cid

Photographe des célébrités. Mais pas seulement…



Il y a du plaisir dans ses images, le plaisir pour le modèle d'être là et de participer au jeu mis en place par le photographe, oubliant un temps les obligations promotionnelles et le rythme fastidieux des interviews, pour livrer une part de vérité, de décontraction.

Mais Manuel Lagos Cid, fils de réfugiés politiques chiliens, au passé de militant politique, ne se satisfait pas de la seule compagnie des célébrités, il lui faut aussi donner, offrir en partage son art du portrait, aux inconnus, oubliés ou bafoués de la société. En 2005, pour une ONG, Il photographie dans les quartiers périphériques de Lima, au Pérou, ceux qui travaillent au recyclage des détritus. Naît une galerie de portraits réalisés sans à priori, dans une veine documentaire. D’autres projets suivent, qui procèdent tous de la série : les colleurs d'affiches à l'élection présidentielle de 2007 (une centaine de portraits), le tuning, entre 2008 et 2011, où chaque image (encore une centaine de portraits) montre l'auteur avec son oeuvre devant son habitation, une véritable étude sociologique. Et tout dernièrement, à Dunkerque, pour l'association Coud´Pouce qui œuvre pour la réinsertion dans le monde du travail, il photographie les ouvriers de l'atelier de confection qui récupèrent les vieux vêtements, les modifient et les revendent. Une exposition de sept photographies 2 x 3 m imprimées sur bâches sera inaugurée le 5 octobre à Coudekerque-Branche. 

 

Du portrait de star au portrait documentaire



Comme tous les habitués du 108, département graphique de Négatif Plus, j'avais vu les photos de  Manuel Lagos Cid, exposées dans leur version grand format sur papier Hahnemuehle. Des photos qui en imposent autant par leur valeur créative que par l'aura des personnes photographiées. A fréquenter le star system, je pouvais m'attendre à interviewer un photographe ayant pris la grosse tête, gagné par les affres de la célébrité. Mais non, Manuel Lagos Cid est d'abord, comme ses photos le disent si bien, quelqu'un d'enjoué, prêt à l'émerveillement, le regard lumineux, souriant d'humanité, parlant de son métier, qui demeure une passion, avec naturel et sans aucune forfanterie.

" Mes premiers souvenirs de photographie datent de mes cinq ans, quand ma mère, qui faisait beaucoup de photos, m'emmenait dans son laboratoire ; je me rappelle les ambiances rougeoyantes et les odeurs suaves et acides de ces lieux de mystère. Puis ce fut mes premières photos d'adolescent et la découverte de l´image qui apparaît dans le révélateur. Mais l'idée d'en faire mon métier n’est venue que bien plus tard."

Ses parents sont réfugiés politiques venus du Chili, son père est le premier de sa famille à avoir fait des études. Devenu enseignant, salarié et fonctionnaire, il est heureux et fier de ce statut, comment pourrait-il admettre que son fils soit tenté par une carrière de photographe indépendant avec l’incertitude d’emploi que cela implique ? La conscience de soi et la réussite doivent passer par le savoir. Il fait donc des études de sociologie.

" Je suis allé jusqu'en maîtrise, puis j'ai tout lâché pour me consacrer à la photo. Des copains musiciens m'ont demandé de faire les photos de leur groupe, celles-ci ont été appréciées et en ont généré d’autres, jusqu’aux premières commandes. En parallèle j'ai suivi des cours de photographie à l'université Paris 8 car c'était malgré tout important de valider mon expertise par des études." 

L'entrée dans le métier, à la fin des années 90, par le biais de la presse musicale a décidé de la suite. Du rocker au cinéaste, de l'écrivain à l'animateur TV, les portraits de célébrités se sont enchaînés. La rigueur technique associée au foisonnement des idées ont fait de lui l'un des contacts privilégiés de la presse magazine pour le portrait de star. Une valeur sûre. 

" Pour moi la photographie, c'est le portrait, la rencontre avec les gens. Il n'y a pas d'alternative. Tout mon être est dirigé vers l'autre, il est le sujet unique de ma photographie. Qu'il soit star ou quidam, digne ou déchu.“


Mais même quand on est à ce point passionné par le portrait, ce n'est pas toujours facile de réussir la bonne photo, en 10 minutes, dans une chambre d'hôtel ou au coin d'une rue. 

“Je m'en sors en préparant énormément mes images. A chaque séance, je viens avec de nouvelles idées, avec pour chacune des croquis et de nouvelles conceptions de lumières.“ Autre atout pour Manuel Lagos Cid, mais il reste très discret sur ce point, ses clichés sont d’une qualité rare, le plus souvent réalisés avec un boîtier Mamiya équipé d'un dos Phase One P25 et un ensemble de flashes de studio portatifs.

Pour ses recherches personnelles, il préfère l'argentique, travaille idéalement avec un Mamiya 7 équipé d’un 65 mm, mais il lui arrive de choisir la chambre grand format comme ce fut le cas pour les portraits au Pérou. Toujours au minimum le moyen format pour la finesse de restitution et le rendu des zones de flou, et presque toujours en couleur.

“ Au début, comme beaucoup, j'ai fait du noir et blanc car je pensais que pour exister en tant qu'oeuvre d'art  la photo devrait être achrome. Puis j'ai vu la série « East coast-West coast » d'Alfred Seiland, photographe autrichien travaillant en couleur. Ça été le déclic, depuis je travaille quasi exclusivement en couleur."

 

Paris Match et un livre aux éditions de La Martinière



40 ans, Manuel Lagos est un jeune photographe, au tout début d’une carrière prometteuse. Ses jeux et facéties du portrait de star, et ses envies de portraits documentaires n’ont pas fini de nous surprendre. Associé chaque semaine à Paris Match, grâce à Clelia Bailly, responsable photo des pages culture qui lui fait totalement confiance, il affirme depuis 3 ans sa renommée de portraitiste. Sa collaboration avec les éditions de La Martinière sur un des livres événement de la rentrée 2013 devrait également promouvoir son sens du jeu et de la mise en scène. Ce livre concerne la flambée médiatique de Rémi Gaillard, le gagman dont le site est le site français le plus vu dans le monde avec 1,5 milliards visiteurs. Manuel Lagos Cid a réalisé une vingtaine de portraits de Rémi Gaillard en situation dans des décors rappelant ses gags vidéo les plus plébiscités sur You Tube. Chaque image est présentée en double-page et rythme cette monographie attendue par tous les groupies.

 

Négatif Plus pour la fidélité de restitution des fichiers

 

"Je confie depuis environ 5 ans la réalisation de mes books à Négatif Plus. Ma chaîne graphique étant parfaitement équilibrée, j'apprécie la fidélité de reproduction, sans interprétation des fichiers, dont est capable ce laboratoire.

Pour l'exposition du 108, le tirage grand format sur papier mat a nécessité quelques ajustements et j'ai aussi apprécié ses compétences dans le tirage d'expo. Du coup, je leur ai confié la réalisation des tirages sur bâches pour l'exposition de Coudekerque-Branche. Régulièrement, je fais aussi imprimer des livres de présentation de mon travail." 


Niels Sidsel


http://www.manuellagoscid.com/