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En photo Publié le 3 août 2015

Gueule d’Ange – Numéro 33 – Thierry Nectoux

L’œil est bleu. L’attention douce et enthousiaste. Derrière l’objectif, la perspective est sociale, radicale. Aimantée par la présence humaine, chacune de ses images décline au pluriel l’engagement, la militance.


Après 20 ans de reportages, principalement pour la presse syndicale, Thierry Nectoux demeure un  témoin essentiel des mouvements sociaux qui ont marqué ces dernières décennies. Sa quête de l’autre et son goût de la rencontre restent intactes. «Pour moi, le reportage, c’est d’abord un travail de recherche, d’enquêtes et de témoignages. Cela nécessite du temps et implique une réelle attention à l’autre afin de produire l’image juste, et non pas juste une image ». Dans cette voie du photojournalisme, Thierry Nectoux se distingue par la vision bienveillante qu’il porte sur les gens. Un regard d’humilité qui ni ne juge ni ne caricature. Ciselée par la lumière, la centralité de l’être se conjugue à l’intériorité.


L’œil social

Photographe de tous les engagements



A travers les images de Thierry Nectoux, on s’immisce dans une multitude d’existences, de passions qu’incarnent des combats politiques nécessaires. Photographe, tireur, portraitiste, photojournaliste, enseignant, grand voyageur, galeriste en ligne… L’homme n’a cessé de multiplier ses rapports à l’image, les renouvelant à l’heure numérique.

C’est comme tireur noir et blanc à l’Atelier Publimod qu’il démarre sa vie professionnelle. De ces fécondes années, il garde une véritable passion pour l’alchimie argentique. « Je photographie désormais en numérique et en couleurs avec un Nikon D4, mais j’apprécie de reprendre mon Leica M6 chargé en Tri-X afin de prolonger, l’une de mes séries, comme celle sur les dormeurs ; des portraits qui accompagnent l’assoupissement de personnes dans des lieux publics ».

Son choix initial du noir et blanc et l’intérêt qu’il accorde au tirage l’ont conduit à créer en 1999, une galerie en ligne, Chambre noire. Collectif d’artistes rassemblant les talentueux Bruce Clarke, François Goudier et les prestigieuses signatures de Claude Dityvon, Jean-Claude Gautrand, François Le Diascorn, Hervé Gloaguen ou de Lily Franey, Chambre noire allie un remarquable fond d’archives à des productions d’auteurs d’aujourd’hui. On peut acheter des tirages originaux, numérotés et signés. Depuis la faillite des agences, comme Rapho, Chambre noire tente de préserver un bel esprit, libre et créatif et surtout une pluralité de regards. Une nécessité pour Thierry Nectoux qui voit en Chambre noire « une respiration dans le flux quotidien ».

Saisi par l’urgence de l’actualité, le photographe demeure plus que jamais engagé. Mobilisé par la presse syndicale, son champ d’action élargi le plonge au cœur de la manif des pro-avortement, au ministère de la Culture où il a récemment photographié Aurélie Filipetti… Quelques jours plus tard, il fera un reportage sur les surveillants de la prison des Baumettes, à Marseille.

Porté par l’envie de transmettre sa passion, le photographe s’est très vite tourné vers l’enseignement. D’abord chez SPEOS et depuis 1997 auprès de la municipalité de Villemomble. A l’issue de chaque session annuelle, une exposition clôture la formation. Pour cette fois, il a choisi le thème du sport, année olympique oblige, et a proposé à ses élèves une exposition en extérieur : les images seront tirées sur des bâches de 1,50m de large.

Par delà le Mexique, où il vit une partie de l’année (à quelques 70 km de Mexico), Thierry Nectoux connaît bien les Balkans, la Serbie notamment où il a couvert, en 1991, le début de la guerre de l’ex-Yougoslavie. Sur les routes du voyage, son usage du monde renouvelle l’attention aimantée par l’autre. Sa collaboration avec le groupe Ouest France le mobilise dans des grands pays de pêche (Ecosse, Norvège, etc.) en fonction d’événementiels majeurs (salon Seafood à Bruxelles) et de sujets magazine.
 


Œil social

Une nouvelle vision : le web journalisme



Avec une dizaine de photographes, Thierry Nectoux vient de créer Œil social, un site en prise directe avec l’actualité sociale, politique, économique, culturelle. Plate-forme fonctionnant comme une banque d’images à destination de la presse et de l’illustration, facilement accessible par les iconographes, Œil social se distingue par une conscience chevillée au corps. D’une moyenne d’âge d’environ 35 ans, tous les membres développent une vision plurielle sans manichéisme. Francine Bajande réalise des portraits du monde de la culture, Dominique Lorieux a suivi des pêcheurs à pied du Morbihan, Natacha Soury se distingue par un travail aux lumières travaillées, Clément Martin montre la vie dans les collèges et lycées, sans oublier d’autres membres aussi actifs tels que Daniel Maunoury et Anna Solé. 

« J’espère que d’autres, jeunes, photographes animés d’une conscience sociale qui ont envie de faire évoluer les cadres du web journalisme vont nous rejoindre. L’abonnement mensuel est de 54 euros, chaque membre conserve entièrement la main sur ses images ».
 


Dans l’oeil du cinéma



Jusqu’à son transfert à Bercy, Thierry Nectoux a été le photographe de la Cinémathèque française. La passion du septième art ne l’a pas quitté, bien au contraire, sa galerie de portraits d’acteurs, de réalisateurs, de techniciens ne cesse de grandir. Entre Mexique et France, ses images documentent deux cinématographies parmi les plus passionnantes.

Michel Piccoli, Léos Carax, Catherine Breillat, Isabelle Huppert, Jacques Doillon, Arturo Ripstein, Carlos Reygadas, Valentina Leduc Navarro… Mais aussi des cadreurs, des techniciens, des éclairagistes moins connus certes mais essentiels travailleurs du Septième art. Autant d’arrêts sur images qui délivrent une singularité, car tous ces portraits possèdent une beauté aux éclats ambivalents. En couleurs ou noir et blanc, aux nuances pastels ou saturées, réalistes ou floues et envoûtantes, toutes les expressions s’allient pour constituer un panorama humaniste jamais dénué d’humour. Chaque portrait restitue à la fois la portée politique et la ferveur poétique d’artistes éloquents.


Négatif Plus pour les tirages et la retouche

 

 «Je confie tous mes tirages, à partir de fichiers, à Négatif Plus. Je leur fais une entière confiance, et je n’ai jamais été déçu par rapport à la visualisation sur écran. Je me consacre exclusivement à la prise de vue et je n’ai ni le temps ni l’envie de me lancer dans des retouches complexes, je me limite aux corrections de densité et de colorimétrie. Dès qu’il y a besoin d’une retouche plus poussée, c’est le service graphique de Négatif Plus qui s’en charge. Les tirages sur bâches de l’exposition à Villemomble seront réalisés par Négatif Plus ».


  Niels Sidsel

http://www.chambrenoire.com/thierry-nectoux/