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En photo Publié le 14 juillet 2015

Gueule d’Ange – Numéro 14 – Gilles Cohen

La force du premier regard

 


N&B ou couleur, peu importe, ce qui compte c’est le regard, cet œil unique posé sur le monde. La première rencontre, la spontanéité du geste, l’instant fragile où les lignes s’assemblent, les espaces s’équilibrent et les émotions s’apaisent. Gilles Cohen est en permanence dans la recherche de cet état de découverte, de disponibilité à l’émerveillement, même vis à vis des petites choses et moments du quotidien. Son voyage en Inde, qu’il a voulu appréhender vierge de toute préparation visuelle pour nourrir l’effet de découverte, en est bien l’illustration. Pour Gilles Cohen, la photo est d’abord un plaisir, comme un jeu d’enfant mille fois répété et toujours aussi merveilleux. Pas question de le gâcher par des  images toute faîtes, des techniques efficaces et glacées de l’ennui.


 

 

Photographe de studio

 


Tout est dit à l’adolescence. Il sera photographe. Une école de photographie et un voyage en Afrique de l’Ouest de plus de 6 mois pour ses 18 ans le confortent dans ses convictions. «  L’école ne m’a pas appris grand chose, pas de recettes, pas de savoir faire à exporter directement dans le monde professionnel, mais elle m’a donné l’envie de continuer, et c’est déjà beaucoup. » Le voyage a toujours une valeur initiatique. Même si les images qu’il rapporte de ce périple, principalement en noir et blanc, ne révèlent pas un style particulier, le plaisir est là et la certitude de suivre le bon chemin. 

Depuis, rien ne s’est démenti, voilà près de 20 ans que Gilles Cohen évolue dans la profession, côté pub et événementiel. Il photographie les grands hommes de la politique et du showbiz pour des portraits, posés ou non, qui ont toujours l’air de laisser entrevoir une part de vérité, celle qui transparaît dans l’échange, la connivence des regards. Photographe des objets et des espaces, il multiplie les expériences techniques et les découvertes : du parfum au vin, de la lessive aux engins motorisés,…, les gares et aéroports, l’architecture et le Hi Tech.

 

« Un photographe peut appréhender tous les sujets. J’ai toujours évité de m’enfermer dans un savoir faire, une maîtrise technique qui rassure le client et évite le stress au photographe. L’image exceptionnelle, unique, ne peut naître que de la prise de risque, de la maladresse, de la magie photographique. Je pense ne jamais être aussi bon que dans le premier regard, celui de la découverte. C’est ainsi que je conçois mon métier, dans un plaisir de photographier sans cesse renouvelé. » 


Dans son studio proche du canal Saint-Martin il aime construire de nouveaux éclairages pour des bijoux contemporains, bricoler des décors nocturnes pour la dernière publicité Nivea ou chercher la solution pour faire tenir cette chaussure Nike sur sa pointe. Chaque photo est un défi, un renouvellement. « Je n’ai jamais été assistant, j’ai tout appris face au client, dans l’urgence de la commande. Je l’ai souvent regretté, mais je pense aussi que cet apprentissage par la bricole, les essais multiples, les insuccès et aussi de formidables réussites, m’a appris à ne rien considérer comme acquis, même après 17 années d’expérience. J’aborde toujours une nouvelle commande sous un jour nouveau, je me laisse entrainer vers de nouvelles techniques, je prends des risques pour atteindre la photo qui me plaira, qui saura me surprendre. »

Pas étonnant que Gilles Cohen soit un adepte de la première heure du numérique et de ses développements informatiques. Photoshop, Illustrator, Flash,…, il y a va à fond. Il assure lui-même la postproduction de ses images, son site c’est lui, chambres et moyens formats ont été remisés pour laisser la place au tout numérique.


 

De retour d’Inde

 

 


« Le voyage est une source inépuisable de découverte, des lieux et des personnes. Je suis parti en Inde sur un coup de tête, dans une totale improvisation. Sans confort, sans certitude du lendemain, ça n’a pas toujours été facile, mais c’était nécessaire à l’authenticité de mon reportage. De même, je n’ai pas voulu regarder et m’imprégner d’autres images avant mon départ afin de privilégier la découverte. J’y suis allé avec un œil neuf. » 

Les images montrées ici, en avant-première pour Gueule d’Ange, avant d’être présentées sur les grilles du Sénat (une exposition sur le thème du Gange est espérée pour 2011) sont celles d’un photographe sensible aux lignes et aux espaces, aux points d’ancrage où l’œil s’appesantit, aux lumières et à ses couleurs. Mais Gilles Cohen ne s’est pas arrêté là. 
 

 

 

« Je suis un touche-à-tout, c’est en me cognant aux murs, en rebondissant sur les difficultés que j’ai fini par réussir, par m’imposer dans mon métier. Je ne suis pas du genre à filer droit. Les méandres et les aléas sont nécessaires à ma photographie. »


Boulimique de technique et de création, il a composé des diptyques et certaines images ont été complètement déconstruites sur Photoshop dans une veine surréaliste. L’ensemble demeure cohérent dans la simplicité et l’équilibre. 

« Il est difficile de tout dire dans une image. Dans un diptyque, la ligne peut se prolonger, la couleur s’accentuer, les émotions s’associer. Ou se contredire et créer le doute. L’idée de la déconstruction m’est venue de ma passion pour l’univers pictural, des œuvres de Dali, Matisse, Cézanne ou Picabia et des possibilités de l’outil informatique. Pour moi le Taj Mahal prend une nouvelle force expressive dans ce désordre esthétique, dans cette nouvelle construction. » 


De retour d’Inde, les plus belles images sont souvent l’œuvre de coloristes travaillant à l’extrême les contrastes et saturations comme si la vivacité des couleurs avaient le pouvoir d’effacer la misère et le gris d’une vie d’offense. Parfois ce sont à l’inverse celles issues du sillon social, souvent en noir et blanc, qui emportent notre adhésion. Ici, c’est simplement le plaisir de photographier, un émerveillement ordinaire, un regard honnête, qui les fait exister et remarquer.
 

Un livre des photos d’Inde tiré chez Négatif+ et offert au Sénat


J’ai été parmi les premiers clients de Négatif+, au moment de l’argentique je leur confiais mes développements et tirages. Avec le numérique, je livre directement des fichiers et le laboratoire a moins d’importance, mais j’ai récemment renoué avec Négatif + grâce à leur nouveau service de tirage de livres. Grace à ce procédé, j’ai pu réaliser un livre de mes images d’Inde et l’envoyer aux différentes institutions susceptibles de les exposer. Un de ces livres est au Sénat. Un vrai livre, de bonne qualité et à un prix défiant toute concurrence.

Niels Sidsel



Pour en savoir plus et découvrir son travail professionnel et personnel rendez-vous sur son site http://www.gillescohen.com.

 

 
Numéro : 14 Spécial Gilles Cohen
Juillet – Aout – Septembre 2009


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